Epandage par drone de produits phytosanitaires : que dit la loi du 23 avril 2025 ?
- Thomas Poulard
- 14 mai
- 2 min de lecture

Le 24 avril 2025, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (l'Anses) a publié, dans le cadre de sa mission de phytopharmacovigilance, une alerte relative à l’effet de l’exposition aux pyréthrinoïdes, une famille de pesticides, sur le neurodéveloppement lors de la grossesse (le lien vers cette étude est ici).
Hasard du calendrier, la loi n°2025-365 du 23 avril 2025 visant à améliorer le traitement des maladies affectant les cultures végétales à l'aide d'aéronefs télépilotés - autrement dit, le recours aux drones pour l'épandage des produits phytosanitaires - a été publiée au JORF le 24 avril 2025.
Que dit-la loi ?
1️⃣ Elle maintient l’interdiction de principe de l’épandage par drone.
La loi maintient l’interdiction de principe de la pulvérisation aérienne des produits phytopharmaceutiques (art. L. 253-8 I CRPM), sauf autorisation temporaire par arrêté ministériel « pour lutter contre un danger sanitaire grave qui ne peut être maîtrisé par d’autres moyens » (art. L. 253-8 I bis A CRPM).
2️⃣ Elle prévoit une nouvelle exception pour les produits réputés les moins toxiques.
La loi prévoit désormais la possibilité d’autoriser les programmes d'épandage par drone de certains produits phytopharmaceutiques (ceux réputés les moins toxiques : produits de biocontrôle, produits autorisés en agriculture biologique, etc.) sur certaines parcelles (celles présentant des « pentes supérieures ou égale à 20 % ») ou certaines cultures (bananeraies et vignes-mères de porte-greffe), lorsque ces programmes « présentent des avantages manifestes pour la santé humaine et pour l'environnement par rapport aux applications par voie terrestre » (art. L. 253-8 I bis B CRPM).
Un arrêté ministériel pris après avis de l’ANSES et consultation des organisations professionnelles et syndicales agricoles doit définir les conditions d’autorisation de ces programmes.
La loi pérennise ainsi un dispositif expérimental qui avait été instauré pour 3 ans par la loi dite « EGALIM » du 30 octobre 2018 (art. 82).
3️⃣ Elle ouvre de nouvelles possibilités d’expérimentation.
De nouveaux programmes d'épandage pourront être autorisés par arrêté ministériel « lorsqu'ils présentent des avantages manifestes pour la santé humaine et l'environnement par rapport aux applications par voie terrestre » (art. L. 253-8 I ter A), « à titre d’essai pour une durée maximale de trois ans » (art. L. 253-8 I ter B).
A l’issue de ces essais, un arrêté ministériel listera les types de parcelle ou de culture pour lesquelles les résultats auront été concluants, permettant à terme d’autoriser de manière pérenne ces programmes d'épandage dans les conditions indiquées au 2️⃣ ci-dessus (art. L. 253-8 I ter C).
Qu'en penser ?
Le législateur s'est fondé essentiellement sur une seule note de l’ANSES du 1er juillet 2022, pourtant peu concluante (pour prendre connaissance de cette note, c'est ici).
Sans nier a priori l'intérêt que peut représenter le recours aux drones dans certains contextes très particuliers, particulièrement pour la santé des ouvriers agricoles, la note met aussi en exergue la nécessité de poursuivre l'évaluation, notamment pour mieux caractériser l'exposition des personnes, compte tenu du peu d'essais conduits in situ et de la grande variabilité des résultats selon la hauteur de vol, les buses, etc.
Surtout, si cette ouverture est réservée en l'état aux produits phytosanitaires réputés les moins toxiques, rien ne garantit que le législateur ne sera pas tenté, à terme, de l'étendre aux pesticides "conventionnels".
La vigilance est donc de mise !